Deux mois après sa répression meurtrière des manifestations indépendantistes de mai 1955 organisées notamment à Douala, le pouvoir colonial frappait d’interdit l’Union des populations du Cameroun (UPC), contraignant cette formation à prendre le maquis. En septembre 1958, Ruben Um Nyobé, figure de l’UPC, était capturé par les militaires français et abattu. L’indépendance octroyée par Paris en 1960 s’est effectuée sur fond de violences, l’armée française prolongeant une vraie guerre conduite contre les militants nationalistes. Ce fut la première intervention néocoloniale en faveur du gouvernement Ahidjo, choisi et contrôlé par l’ex-métropole. Le soutien durera jusqu’en janvier 1971, lorsque fut exécuté le dernier dirigeant maquisard, Ernest Ouandié.
Toujours ignorée de l’opinion française, cette guerre contemporaine de celle d’Algérie a laissé une plaie à vif dans la mémoire camerounaise. D’où l’effarement ayant accueilli le dernier gadget sarkozyen concernant l’Afrique : inviter les chefs d’état des ex-colonies dans la tribune officielle pour le défilé du 14 Juillet prochain. Premier titre quotidien, le Messager vient de publier une longue lettre ouverte à Nicolas Sarkozy signée Badiadji Horretowdo, rappelant la cruauté de cette « campagne d’extermination : sagaies contre armes automatiques, à grand renfort de napalm »…
Interrogé, Moukoko Priso, actuel secrétaire général de l’UPC, souligne : « La présence sur les Champs-Élysées de chefs d’État de l’Afrique dite francophone serait la confirmation du fait que nous vivons toujours dans un système de nature coloniale. L’initiative française peut être perçue comme une espèce de deuxième discours de Dakar ; une nouvelle insulte… » Quant aux présidents qui répondront ? « Ils vont chez le maître boire le champagne… » Samuel Mack-Kit (dirigeant UPC également) ajoute : « La diaspora africaine est excédée par l’arrogance des milieux gouvernementaux français… »