L’ONU cloue au pilori la France de Sarkozy

La France a été sévèrement critiquée les 11 et 12 août par les 18 experts du Comité pour l’élimination de la discrimination raciale de l’ONU (CERD). Ceux-ci, dont le Togolais Kokou Ewomsan, ont dénoncé un « manque de volonté politique » face à une « recrudescence notable du racisme et de la xénophobie » dans le pays.

Ces attaques ont été portées dans le cadre de l’examen périodique des pays ayant ratifié la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale de 1965. La politique de la France envers les minorités a été passée au crible. Et le résultat a été catastrophique.

Le débat, habituellement très technique, a pris un tour politique après les annonces scandaleuses de ces dernières semaines du chef de l’État français, Nicolas Sarkozy, qui a réclamé la déchéance de la nationalité française pour les « Français d’origine étrangère » qui se seraient rendus coupables d’atteinte à la vie de policier ou de tout autre dépositaire de la force publique.

« L’époque de Pétain »

Son ministre de l’Intérieur, Brice Hortefeux, a été plus loin en demandant la même peine pour des crimes de polygamie ou d’excision. Par ailleurs, le gouvernement a lancé l’évacuation de camps illégaux de Roms et fustigé les cas de délinquance dans cette population d’origine roumaine et bulgare ainsi que parmi les gens du voyage, qui sont pourtant en grande majorité français. Ce qui n’empêche pas les autorités de leur délivrer un « carnet de circulation » qui, indique le Nigérien Waliakoye Saidou, « rappelle l’époque de Pétain ».

La délégation française eu beau annoncer le lancement très attendu d’un plan national de lutte contre le racisme, rien n’y a fait. Selon un expert, les déclarations du président s’apparenteraient même à « une incitation à la haine ». Sur la déchéance de la nationalité, le Turc Gun Kut a déclaré : « Je ne comprends pas ce que c’est qu’un Français d’origine étrangère », ajoutant qu’il se demandait « si cela était compatible avec la Constitution ».Et pour l’’Américain Pierre-Richard Prosper, rapporteur de la session, « ce qui manque en France, c’est une vraie volonté politique ».

Face à ces attaques, le gouvernement français a aussitôt répliqué par la voix de Pierre Lellouche, secrétaire d’État chargé des Affaires européennes, en affirmant que les politiques menées par la France visaient à « garantir les libertés publiques » ainsi que le droit à la sécurité, « premier des droits de l’homme ».

« Comité suspect »

Puis l’Union pour un mouvement populaire (UMP, parti présidentiel) est à son tour monté au créneau. Le porte-parole adjoint de l’UMP Dominique Paillé n’a pas hésité à se déclarer surpris de la composition du CERD « avec des gens qui viennent de pays qui ne respectent absolument pas les droits de l’homme » (sic). Et d’ajouter que si la situation était si grave en France, il ne voyait pas « pourquoi il y aurait tant de candidats à l’immigration ».

Le député UMP du Nord Christian Vanneste a été encore plus précis. Sur France Info, il a déclaré que la « constitution même » du comité « le rend suspect ». « Tous les pays qui en font partie ne sont pas des exemples de démocratie vivante ni des exemples du respect des minorités : l’Algérie, la Russie, la Roumanie, qui traitent très mal les Roms chez eux – il faut voir dans quel état ils sont lorsqu’ils viennent chez nous. » Et tant pis si l’Algérie compte assez peu de Roms…

Dans l’opposition, le Parti socialiste (PS) s’est contenté de déplorer « l’image exécrable » de la France après les critiques du comité de l’ONU, annonçant un plan sur la sécurité en janvier 2011. Selon le PS, « il faut désormais considérer que le premier responsable de ce climat d’insécurité et de xénophobie, c’est le gouvernement ».

Des ONG se sont en revanche félicitées des critiques de l’ONU sur ce qu’elles ont appelé les « récentes dérives du président français ». La France, où l’on observe « un climat général de durcissement de la xénophobie », « a été mise sur le grill » comme jamais, selon Malik Salemkour de la Ligue des droits de l’homme.

Le CERD doit conclure sa session le 27 août par une série de recommandations à la France. Qui devrait y regarder à deux fois avant… de ne pas les appliquer.

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