“29” est le nombre d’années que Monsieur Biya a déjà passé comme président de la République du Cameroun, jouissant de pouvoirs absolus, pour produire les résultats suivants :
– En 1983, 21 % des Camerounais vivaient au dessous du seuil de pauvreté ; en 2008, ils sont 39, 9 %, soit près du double. Sur les dernières années, le taux d’inflation annuel en hausse à 6 % combinée a une croissance annuelle de la population de 2,8%, la somme des deux rapprochée au faible taux de croissance annuel de 2,9% ( chiffres produits dans le Rapport sur les Comptes Nationaux du Cameroun publié en Mars 2010 par l’ Institut National de la Statistique ), ont eu pour résultante un taux de paupérisation, c’est-à-dire une augmentation de l’ appauvrissement de la population, de 5,9% d’ une année a l’ autre.
– L’espérance de vie des Camerounais, qui était de 40 ans en 1960 a atteint 53 ans en 2007 pour ensuite tomber à 48 ans en 2010. Dans le même intervalle de temps, au Gabon, l’espérance de vie , partie de 38 ans en 1960, était de 58 ans en 1987 et est de 60 ans en 2010 [1] , soit 12 ans supérieure à celui du Cameroun !!!
– En 1983, le secteur informel avec ce qu’on lui connaît de rémunération dérisoire et de précarité, et qui en réalité est un déguisement du chômage occupait 26% de la population, aujourd’hui il en occupe 90%. Il en ressort que le sous- emploi au Cameroun est à 75, 8% [2], ce qui suggère une évaluation empirique du taux de chômage réel de 65% avec un pic de 80 % pour les femmes et les jeunes gens âgés de 20 à 35 ans.
– L’apport quotidien en calories qui est la quantité de calories qu’un individu doit consommer pour avoir un niveau d’activité satisfaisant est 2500 calories pour une activité modérée. A l’heure actuelle, cet apport est de 1950 calories pour un Camerounais contre 2511 pour un Gabonais ! Ce chiffre renvoie au pire des constats : Le Camerounais n’est même plus assez alimenté… Ajouter à la dure réalité des pénuries d’eau et d’ électricité, le tableau des privations auxquelles notre peuple est soumis renvoie tout simplement à une image d’ enfer sur terre.
Mettre fin a l’exception camerounaise
Taux de chômage et de sous-emploi à des niveaux stratosphériques, augmentation de la cherté de la vie et de la pauvreté, alimentation quotidienne insuffisante, espérance de vie en baisse : voilà un bilan de la gestion du Cameroun pendant près de 30 ans par Biya et qui est, à tout point de vue, identique à celui qui vaut aujourd’hui a Ben Ali et Moubarak d’ être rejetés par le peuple, ce qui politiquement justifie que le même sort soit réservé au président du Cameroon. Ce bilan accuse et condamne sans appel possible Paul Biya qui plus est partage avec Ben Ali et Moubarak la pratique d’un pouvoir autoritaire trentenaire, une tradition de violation constante des pratiques démocratiques minimales et des droits citoyens, un mépris totale de la vie des personnes, trônant sur un système caractérisé par une corruption endémique, un népotisme systémique qui se manifeste au Cameroun sous sa forme répugnante qui est le tribalisme qu’ il a développé.
L’apothème énoncé par lui il y a quelques années selon lequel ” Le Cameroun c’ est le Cameroun “, prétendant ainsi établir une “exception camerounaise”, est une supercherie intellectuelle absolue. Le peuple camerounais comme tous les peuples de la terre a droit à la liberté, à une vie décente, au respect de sa dignité, toute chose que Biya lui refuse. Le peuple doit donc dans un sursaut patriotique se mobiliser à tout mot d’ ordre porté par l’ idée : ” BIYA doit partir ( Bdp) … maintenant”, sinon l’ avenir du pays est en danger , et pour cause…
“35” est le nombre total d’années que Biya aura la possibilité de passer à la tête de l’Etat si la persistance dans une attitude de passivité des Camerounais l’autorisait à s’octroyer un autre mandat en octobre prochain comme il en affiche l’intention. Si une telle éventualité se réalisait, ce sera pour le Cameroun sept années supplémentaires du voyage au bout de la nuit de son interminable naufrage économique et social. Il est désormais d’une accablante évidence que Biya n’a plus, ni les connaissances techniques, ni les qualités de leadership appropriées pour changer le cours des choses. En langage de management, on dira que Biya a depuis des années atteint son “seuil d’incompétence”, ce point au-delà duquel les aptitudes et les connaissances d’un individu ne sont plus à la hauteur de la tache à lui assignée.
Sauf le respect dû à sa personne humaine et ne considérant que l’acteur public, le “quasi –octogénaire” formé a l’Ecole des administrateurs coloniaux il y a cinquante ans n’a en effet plus l’aptitude à relever le challenge central auquel le Cameroun fait face depuis 25 ans et qui est l’économie. S’il avait encore une telle aptitude, l’annonce d’ un taux de croissance prévisionnel de 3. 5% en 2011 l’aurait fait sursauter d’émoi, car, c’est un taux minimum de 7% qu’il faudrait pour stabiliser le chômage à son niveau actuel et, si l’objectif est de le faire reculer de manière significative, c’est un taux de croissance à deux chiffres, c’est-à-dire d’ au moins 10%, qu’ il faut viser. . Cette incompétence en matière de vision, de compréhension et de formulation des politiques économiques, Biya l’a toujours dissimulée avec la feuille de vigne d’abandonner le pilotage de notre économie entre les mains des “costumards” du Fmi et de la Banque mondiale, eux qui depuis 25 ans ne cessent de prescrire au Cameroun une potion supposée miraculeuse, mais qui n’a pas apporté même un début de solution aux problèmes fondamentaux du pays que sont le chômage et l’ insuffisance des investissements !
A écouter Monsieur Biya s’exprimer, on se rend compte, comme j’ai eu déjà à le faire remarquer, qu’il ne comprend et ne sait pas que le nouveau paradigme du développement est une fonction dont les deux variables directrices sont la gouvernance et la compétitivité. Lorsque qu’à l’occasion d’une sortie majeure comme celle qu’ il a faite il y a quelques semaines au comice agricole d’Ebolowa, on ne relève que la tonalité d’ un discours électoraliste et démagogique du niveau d’ un maire d’une commune rurale en quête de réélection, ou nulle mention n’ est faite ni des solutions envisagées pour résorber le chômage, ni des mesures visant à accroître notre compétitivité intérieure et extérieure pour attirer massivement les investissements directs étrangers, on mesure le grave danger auquel est exposé le Cameroun s’ il est maintenu à la tête du pays.
Répression et dictature
Pleinement conscient de ses insuffisances, Monsieur Biya l’est. Il a malheureusement choisi, depuis une vingtaine d’années, de les pallier par un recours a une répression sauvage et sanglante des velléités de contestation politique, par un bâillonnement de la volonté du peuple à travers le contrôle orienté du système électoral.
En matière de répression, la preuve du caractère sanguinaire du régime Biya nous est donnée lorsqu’ il y a quelques jours en Tunisie, on a vu être privilégiée l’utilisation contre les manifestants des équipements anti- émeutes, Ben Ali préférant se démettre plutôt que d’ envoyer tirer sur les populations. On verra un exemple tout aussi remarquable au Caire lorsque pour limiter les bavures, Moubarak a fait retirer la police de la rue pour y envoyer l’armée, laquelle a établi avec les manifestants une relation amicale.
Confronté a une situation similaire en Février 2008, Biya a donné l’ordre de tirer sur la foule et dès le lendemain, son Bir, dont je ne désespère pas de faire passer un jour, avec Biya, le commandement devant une Cour pénale internationale, a tiré sur les jeunes manifestants : 139 en sont morts.[3] Faut-il rappeler le bilan de plusieurs centaines de morts enregistrés pendant les ” villes mortes” durant lesquelles les forces de Biya n’hésitaient pas à tirer sur des manifestants aux mains nues ? A l’ évidence, alors que sous d’ autres cieux les manifestations politiques sont contenues par des forces anti- émeutes, une tradition bien établie au Cameroun veut que le pouvoir s’ autorise le recours à des forces équipées d’ armes réelles qui n’ hésitent pas à en faire usage contre les Camerounais.
Monsieur Biya mérite donc plus que jamais sa place dans la charrette de ces dirigeants “septu-octogénaires” et, sauf le respect dû à sa personne et à son âge comme je l’ai déjà dit, guettés selon la loi de la nature par la sénilité et désormais incapable d’appréhender et de résoudre les demandes sociales, que le peuple mobilisé doit contraindre à quitter le pouvoir sans délai. Ils auront saigner à blanc l’espérance de leur peuple et pour masquer leur impuissance, ils se seront longtemps refugiés derrière une évocation toute en duperie du slogan de la paix et de l’ordre, alors même que chaque jour de plus qu’ ils s’ accrochent au pouvoir, l’ incohérence de leur action met en danger l’ avenir même de leur pays.
En voici une illustration. Le chômage au Cameroun a atteint un niveau tel qu’ il fragilise les fondements de la nation, en ce sens qu’ il n’ y a plus de “nation” lorsque se développe une société duale où une minorité représentant moins de 1% de la population s’engraisse de la prédation des ressources publiques alors que le reste du peuple s’enfonce chaque jour dans la pauvreté, la misère et la désespérance. Le chômage qui est le mantra de ce naufrage est donc désormais un problème de “sécurité nationale” qui mérite une réponse institutionnelle appropriée. Lorsque Monsieur Biya s’accapare du concept de “sécurité nationale” et créé un “conseil national de sécurité”, on se serait attendu à un ” conseil national de sécurité économique” … qui aurait rassemblé ce que le pays compte de meilleurs théoriciens et praticiens de l’économie, des finances et des affaires, au chevet de ce grand malade économique qu’ est le Cameroun depuis deux décennies. On a vu récemment le président Obama, pour juguler un taux de chômage de … 9% (soit 6 fois moins que le Cameroun !) dont il assume la responsabilité politique, après le départ de Larry Sommer, nommer à la tête du “Presidential Economic Advisory Board” le directeur du conglomérat industriel “General Electric”[4] qui anime une équipe rassemblant les plus brillants économistes et hommes d’ affaires du pays. Rien de cela n’a traversé l’esprit de notre président… Lorsqu’ il lui a fallu se doter d’ un “Conseil national de sécurité”, il a choisi que ce soit une institution centrée sur le renforcement de son dispositif sécuritaire, répressif, et corruptif, confié à un personnage sorti de son chapeau comme l’ Enchanteur Merlin, et qui, selon certaines rumeurs, aurait toutes les peines du monde à passer l’ enquête de moralité de base qu’ on faisait passer à l’ époque aux candidats au recrutement comme gendarme ou agent de police !!! N’est-ce pas effarant ?
Voilà un exemple qui illustre parfaitement à quel point le chef de l’ Etat du Cameroun actuel a perdu tout intérêt pour le peuple pour ne se préoccuper que de prolonger son temps pour jouir. Et c’est la raison pour laquelle impérativement, Monsieur Biya doit partir, dès maintenant.
Celestin Bedzigui
Chairman,
Camdiac, Cameroon Diaspora for Change