Des jeunes tenant un gobelet en bambou. Entre deux gorgées de ” Matango “, ils débattent, dans un tohu-bohu indescriptible, de tout et de rien. Nous sommes à Bayong, le quartier 1 de la ville de Mbanga. Un samedi du mois de janvier 2011. Ici, dès 14 h, des jeunes convergent vers l’arbre, point de vente non loin de l’église du coin. A Bayong, il y a de plus en plus de chômeurs. La consommation du vin de palme est à la mode. ” Nos parents en consommaient. Il n’y a pas de raison que nous ne fassions pas autant. Ce vin a ceci de particulier qu’il ne nuit pas à l’organisme. A défaut d’une bière qui coûte 500 Fcfa, nous optons pour le litre du vin de palme “ lance Justin Pengui. Dans tous les points de vente, le litre du vin blanc coûte 150 Fcfa. Avec 2000 Fcfa, Jean Abah et ses amis peuvent ingurgiter une dizaine de litres par jour. ” Parfois nous nous constituons en équipes. Une petite collecte nous permet d’acheter plusieurs litres que nous buvons ensemble. Il y a des jours où vous n’avez pas d’argent et les amis volent à votre secours “, dit-il. Si la consommation abusive de cette boisson par les jeunes n’émeut ni élites, ni autorités traditionnelles ou administratives de la localité, il reste que ” l’affaire ” profite aux vignerons qui se frottent les mains. ” Il m’arrive par jour de vendre une quarantaine de litres. Au final je m’en sors avec au moins 5000 Fcfa. Cette somme me permet de subvenir aux besoins de ma famille “, avoue Nzima Serge, la quarantaine sonnée, qui aurait construit sa maison grâce aux bénéfices tirés de la vente du vin de palme.
Très prisé, le vin de palme qui est une boisson alcoolisée s’obtient à partir de la sève de palmier. ” Lorsqu’il vient d’être recueilli, il est d’un blanc de lait, doux et plutôt sucré. Au fil des heures, la fermentation croît, le vin devient pétillant, fort, et parfois âcre avec une teinte plus foncée. Par son goût et sa légère effervescence, le vin de palme est plutôt assimilable au cidre” reconnaissent les vignerons. “De plus grâce à sa fermentation rapide, il nécessite moins de procédés au plan de la production, puisque une fois extrait, il présente déjà un taux d’alcool entre 1° et 2° pour atteindre les 12° après 72 heures. Après quatre jours, la fermentation acétique prend le dessus et il devient trop acide. Il est alors utilisé soit comme vinaigre, soit distillé pour obtenir de l’alcool “.
Interdite par les préceptes islamiques, le vin de palme est plutôt prisé en pays bamiléké où il occupe une place de choix dans les agapes des mariages, reconnaît Mbeu Ngako Gaston, président du comité banka du Wouri.
A Mbanga, la cueillette du vin de palme se fait généralement en saison sèche. Sa consommation par les jeunes ne date pas d’aujourd’hui. L’on se souvient du ” Matango Club “ du nom de la boîte de nuit de Lapiro de Mbanga (aujourd’hui derrière les barreaux), dans laquelle le ” précieux liquide ” était servi aux clients.