13 décembre 1998-13 décembre 2017 : Il y a 19 ans, était assassiné au Burkina, le journaliste Norbert Zongo

Le 13 décembre 1998, un 4×4 Land Cruiser Toyota calciné dont la carcasse est encore fumante est retrouvé dans la localité de Sapouy, sud du Burkina Faso, avec à bord, trois corps également calcinés. Tout à côté du véhicule, un autre corps, calciné lui aussi, mais ayant réussi à s’extirper du véhicule avant de recevoir le coup de grâce qui l’a empêché de se sauver. Identifications faites, le véhicule cramé avait pour occupants le célèbre  journaliste burkinabè Norbert Zongo, son frère, ainsi que deux autres personnes, les nommés Blaise Ilboudo et Ablassé Nikiéma, désormais sans vie.

Ils ont été abattus par leurs tueurs qui ont ensuite aspergé leur véhicule de carburant puis y ont mis le feu, comme l’expliquera par la suite un témoin.

En ce jour anniversaire de commémoration de ce qui fut alors l’un des plus monstrueux assassinats perpétrés par ou sous le régime Compaoré, et alors que dans certains pays du monde et plus particulièrement en Afrique des journalistes et intellectuels sont tués ou embastillés pour avoir fait leur travail avec zèle ou émis des opinions qui ne plaisent pas aux puissants, alors qu’en ce moment un homme de Lettres, Patrice Nganang risque d’être envoyé en prison ou de subir un sort bien pis que cela, pour avoir publié sur Facebook un écrit où il laisse croire qu’il tirerait une balle dans le front du président camerounais si tous les deux se retrouvaient en face, ce qui semble d’ailleurs d’autant plus impossible que le président camerounais si distant de tout le monde ne se retrouvera d’ailleurs jamais face à lui,  de même qu’une telle blague ne saurait suffire à faire enlever quelqu’un, tant Facebook pullule chaque jour de de dizaines de millions de posts similaires qui enverraient leurs auteurs  en prison 10 fois plutôt qu’une, et ce tous les jours, Cameroonvoice vous propose l’article « BURKINA FASO: La mort de David Ouédraogo, ce sur quoi enquêtait Norbert Zongo avant d’être assassiné », publié il y a quatre ans, le 09 décembre 2013, par notre confrère borromee04.wordpress.com

BURKINA FASO: La mort de David Ouédraogo, ce sur quoi enquêtait Norbert Zongo avant d’être assassiné.
Publié le décembre 9, 2013 par Charles K. Somé

«A quelques jours du 13 décembre 2013 qui marquera le 15e anniversaire de l’assassinat du journaliste d’investigation, Directeur de publication de l’hebdomadaire L’Indépendant, Norbert Zongo, alias Henri Sebgo (H.S) et de ses trois (3) compagnons, je voudrais partager avec vous ce sur quoi travaillait l’homme avant d’être massacré et brûlé. Je précise  que ce qui suit est tiré du Rapport de la Commission d’enquête indépendante mise en place par le président Blaise Compaoré, lui-même par Décret n° 98-0490/PRES/PM/MEF/DEF/MJ-GS/MATS du 18 décembre 1998, sous la pression de la rue en son temps. Dans cet extrait, les codétenus de David Ouédraogo racontent à la Commission d’enquête indépendante ce que fut leur calvaire entre les mains des militaires de la garde présidentielle, le fameux régiment de sécurité présidentielle (R.S.P). Ce qu’ils ont fait subir à David Ouedraogo et ses compagnons jusqu’à ce que le malheureux décède dans les locaux de l’infirmerie de la Présidence du Faso est innommable et digne de véritable cannibale même Hitler n’aurait pas fait mieux. Un fait dont le Président du Faso, Blaise Compaoré a été mis au courant, selon le Rapport de la Commission d’enquête indépendante.

Norbert Zongo alias Henri Sebgo (H.S)

 
                                                                                                                                                                                                                                                           François Compaoré, frère cadet et conseiller économique de Blaise Compaoré

 

Extrait

« Depuis le début de l’année 1998, Norbert ZONGO s’était focalisé sur ce qu’il est convenu d’appeler « l’affaire David OUEDRAOGO », du nom du chauffeur de François COMPAORE, frère cadet du président du Faso et aussi son Conseiller économique depuis toujours. Cet employé est mort le 18 janvier 1998 à l’infirmerie de la Présidence du Faso, vraisemblablement des suites de tortures infligées par des éléments de la garde de sécurité présidentielle qui menaient une enquête sur une affaire de vol de numéraires commis au préjudice de l’épouse de François COMPAORE. Ce dernier dit avoir saisi à la fois la gendarmerie et l’adjudant Marcel KAFANDO, adjoint au chef de la sécurité rapprochée du Chef de l’Etat, (Ndlr: Marcel Kafando est l’un des six (6) suspects sérieux identifiés par la Commission d’enquête dans l’assassinat de Zongo). Marcel KAFANDO confirme : « J’ai été saisi par François COMPAORE du vol d’argent, le jour même. » (p.v n° 99-060 du 16/03/99).

 

Adjudant chef Marcel Kafando, membre du régiment de la sécurité présidentielle

Dans plusieurs de ses écrits, Norbert ZONGO s’est élevé contre le fait que cette affaire de vol, relevant en principe de la compétence de la gendarmerie ou de la police, ait été confiée à des hommes de la garde présidentielle. C’est ainsi que dans le n°229 de L’Indépendant du 13 janvier 1998, il écrit : « Nous ne cherchons pas à savoir s’il y a eu un vol, cela ne nous regarde pas. (…) Ce qui nous préoccupe, c’est l’incarcération des suspects au conseil (…) nous sommes dans un Etat de droit paraît-il. Le Conseil, (Ndlr: les locaux du Conseil de l’Entente) jusqu’à preuve du contraire, n’est ni une brigade de gendarmerie, ni un commissariat de police. Qui conduit les enquêtes sur ce vol en ces lieux ? Comment le fait-il ? Où a-t-on gardé les présumés coupables ? ».

C’est sur ces entrefaits que David OUEDRAOGO meurt le 18 janvier 1998 après plus d’un mois passé dans les locaux du Conseil de l’Entente. La Commission d’Enquête Indépendante qui a eu l’occasion de voir et d’entendre les trois codétenus de David OUEDRAOGO a pu mesurer la cruauté des traitements subis par ceux-ci et probablement par David OUEDRAOGO au cours de leur détention dans les locaux du Conseil, même si leurs geôliers, qui les ont brûlés par le feu, considèrent qu’ils n’ont subi que des « manœuvres ».

En effet, Hamidou ILBOUDO (Ndlr: codétenu de feu David Ouedraogo et employé de maison chez François Compaoré) raconte : « David et moi avons été conduits le 5 ou le 6 décembre 1997 vers 15 h 30 – 16 heures sur la route de Ouahigouya par un groupe de six ou huit militaires du Conseil et avons été frappés puis brûlés. (…) On a d’abord allumé un feu de paille autour de nous à savoir Bruno, Adama et moi qui nous a brûlé les pieds. Ensuite on nous a fait coucher David et moi, sur le dos, au-dessus d’un feu de bois, pieds et bras préalablement attachés. Je me rappelle qu’il y avait les nommés Edmond (Ndlr: Edmond Koama, autre suspect sérieux dans l’assassinat de Zongo) et Yaro (Ndlr: Yaro un nom qui est également mentionné par la Commission comme suspect sérieux dans l’assassinat de Zongo et ses compagnons) parmi les militaires qui m’ont brûlé. » (p.v. n° 99-81 du 24/03/99)

Le récit de Adama TIENDREBEOGO (Ndlr: codétenu de feu David Ouedraogo et employé de maison de François Compaoré) est tout aussi édifiant : « Au Conseil nous avons beaucoup souffert. Le premier jour, nous avons été amenés nuitamment hors de la ville, où Hamidou et moi avons été battus à l’aide de ceinturons par trois militaires. Ensuite, ils nous ont ordonné de nous fouetter à l’aide de branchages. Une deuxième fois, nous avons encore été amenés nuitamment hors de la ville, les yeux bandés et on nous a fait creuser une tombe. On m’a passé une corde au cou et on a tiré dessus. (…) Au Conseil, les tortures étaient quotidiennes. Nous étions frappés et on nous faisait subir toutes sortes de « manœuvres » militaires. Une autre fois, nous avons été amenés hors de la ville tous les quatre par un groupe de militaires. Après nous avoir regroupés Hamidou, Bruno et moi, nous avons été entourés avec de la paille sèche à laquelle on a mis du feu et il nous était interdit d’en sortir. David, lui, avait été amené à l’écart et après lui avoir attaché les pieds et les mains, les militaires lui passaient les flammes sur le corps. Hamidou également a été brûlé seul. » (p.v. n° 99-82 du 24/03/99)

Cependant, le lieutenant-colonel Nazinigouba Ouédraogo médecin-chef de l’infirmerie de la présidence, malgré son serment d’Hippocrate, n’a pas hésité à écrire sur le certificat de décès, que David Ouédraogo  «est décédé le 18 janvier 1998 à 06 h 50 de sa maladie. » Convoqué par la Commission pour de plus amples informations, le lieutenant-colonel Ouédraogo a préféré se retrancher derrière le secret médical et a refusé de témoigner.

« la peur est un sentiment humain, mais c’est notre peur qui renforce notre ennemi, alors il faut combattre la peur de la peur. » Norbert Zongo

Personnellement, je dois dire que je n’ai pas été étonné de voir ce dont Blaise Compaoré et son entourage sont capables. Quand on sait que ce monsieur et ce même entourage ont trahi et massacré le Capitaine Thomas Sankara qui les considérait comme des camarades de luttes, ce n’est pas étonnant. En revanche, savoir qu’ils sont capables de telles cruautés juste pour le pouvoir et les honneurs me donne une idée de quel type d’hommes ils sont et ce dont ils seront capables encore si toutefois les intérêts du clan Compaoré était encore menacés. Norbert Zongo quand on lui demandait s’il avait peur d’être assassiné, il disait: « la peur est un sentiment humain, mais c’est notre peur qui renforce notre ennemi, alors il faut combattre la peur de la peur »

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