Une bande armée attaque à Bonabéri

Ces hors-la loi ont pris tout leur temps pour mettre à sac l’établissement Ecobank, emportant des centaines de millions Fcfa.

1-Au moins cinq personnes tuées par les assaillants

Des sources proches de la morgue de la garnison militaire de Douala portent à  treize le nombre de morts de l’attaque dont la ville de Douala a été victime dans la nuit de vendredi à samedi entre 23 et 3 heures du matin. Officiellement, les sources gouvernementales parlent de cinq morts dont deux vigiles, un conducteur de moto taxi, une femme et un fou. Ce décompte ne prend en compte d’innocents usagers qui ont été criblés de balles. Le bilan fait également état d’une trentaine de blessés graves transportés aux urgences dans différents hôpitaux de la ville : Cebec de Bonabéri, de Bonassama et garnison militaire. Sur le plan matériel, un véhicule des sapeurs pompiers a été atomisé, des voitures des particuliers criblés de balles. Lors du passage du reporter du Messager sur les lieux samedi matin autour de 9 heures, du sang maculait le macadam et des éclats de matière cervicale ornaient encore les pare-brises et les sièges des voitures. Tout de noir vêtus,  une bande armée a pris pour cible l’agence Ecobank de Bonabéri, tenant en respect tout un quartier, voire tout un arrondissement (Douala IVe) pour un butin estimé à plus de deux cent millions (200.000.000) Fcfa.

Un témoin oculaire raconte la scène. “Ils ont coupé la route à la circulation à deux endroits (au niveau du château d’eau de la gare routière et vers la Place du Cinquantenaire) pour isoler la scène de leur opération entre 23h et 3h du matin et posté leurs éléments à chaque barrière. Les autres sont allés tuer les deux vigiles à bout portant pour passer par derrière”. Reprenant son souffle, il poursuit. “C’est lorsqu’ils sont entrés dans la banque que le vrai braquage a commencé. Des coups de feu éclataient de partout et ceux qui s’aventuraient sur les lieux étaient mitraillés sans autre forme de procès. Beaucoup sont morts pour rien”. D’après certaines informations recueillies sur place, les assaillants qui opéraient à visage découvert, communiquaient dans une langue étrangère. Puissamment armés, ces derniers visiblement pas pressés, ont pris tout leur temps pour faire sauter les murs du bâtiment à l’arme lourde, à la dynamite emportant quelque trois sacs bourrés d’argent.

La bande armée sera perturbée par la sirène des sapeurs-pompiers et leur réaction est immédiate. Un officier des sapeurs-pompiers donne sa version des faits. “Ils ont tiré sur nous sans doute par confusion, car ils pensaient que nous sommes des renforts pourtant nous avons été saisis pour aller éteindre un incendie à Ndobo (un quartier périphérique). Ce sont des armes de guerre qu’ils ont utilisées contre nous, heureusement que mes hommes n’ont pas été touchés. C’est la voiture qui est en piteux état”.

Ainsi s’achève l’acte I de ce braquage à Ecobank-Bonabéri. Au moment où un présumé bandit (selon le gouverneur de la région du Littoral) serait entre les mains de la gendarmerie territorialement compétente, des questions se posent. Que faisait une telle somme dans une agence de banque commerciale en début de week-end? Pourquoi n’avoir pas effectué un dépôt à la banque centrale, même si certains responsables accusent la société en charge du transfert d’argent? Des questions qui trouveront difficilement réponse, car lors de sa visite sur le site sinistré samedi dernier, Edgar Alain Mébé Ngo’o et l’imposante délégation qui a fait le déplacement ont été surpris d’apprendre que l’essentiel de l’argent emporté était non pas dans le coffre-fort, mais dans des valises, comme prêt à être transporté (pour la Beac  ?). Toute chose qui laisse penser à quelque chose de pas orthodoxe dont seuls les résultats de l’enquête seront pris en considération.
 
2-Un présumé malfrat arrêté, les forces de l’ordre impuissantes

Malgré la stratégie visiblement bien huilée des assaillants, en dépit des armes lourdes utilisées et nonobstant leur imposante stature physique et musculaire, l’un d’eux serait tombé dans les mailles de la gendarmerie nationale. Après leur coup réussi, l’un des malfrats dont l’identité n’a pas été révélée, aurait maladroitement confondu le lieu de stationnement de leurs embarcations. Il aurait été maîtrisé par un pêcheur pendant plusieurs heures à l’aide d’une machette.  Un témoin raconte la scène. “Après l’avoir neutralisé, la gendarmerie s’est mise à tirer et les deux sont tombés dans l’eau, craignant d’être atteints par les balles”. Au poste de gendarmerie, l’enquêtes piétine, car le présumé malfrat ne parlerait ni l’anglais ni le français, encore moins une langue nationale. Selon des pêcheurs rencontrés par Le Messager, le présumé mis aux arrêts et “exploité” par la gendarmerie nationale serait un pêcheur et non un assaillant, tel que l’indique la gendarmerie. “La personne qui a été arrêteé est un pêcheur qui travaille avec nous”, soutiennent ses confrères.

Comment un gang peut-il tenir le centre névralgique d’un arrondissement de Douala pendant plus de trois heures d’horloge alors que cette unité administrative compte un commissariat central et des commissariats de sécurité publique, une compagnie et des brigades de gendarmerie?  Pourquoi le Bir n’est pas intervenu comme lorsqu’il fallait disperser les émeutiers de février 2008? Comme à Limbé et Bakassi, les assaillants également venus de la mer, ont régné sur la ville et imposé leur loi. Une assertion confirmée par un officier de l’armée qui, dans une conversation avec un supérieur hiérarchique capté par le reporter du Messager, avoue l’impuissance des forces de l’ordre face à la puissance de tir de la bande armée : “On ne pouvait rien y faire. Ils étaient lourdement armés.” L’impuissance des forces de sécurité et de défense nationale se matérialise également dans l’incapacité à donner une riposte adéquate aux attaques de la bande armée.

Une source militaire invoque le sous-équipement. “Ce serait un suicide si les forces réagissaient immédiatement car ces braqueurs avaient des armes sophistiquées et de haute technologie. Même les militaires ne pouvaient rien, de manière frontale, sauf à les encadrer pour les surprendre en pleine mer. Le plus dur, c’est qu’ils vont se réfugier dans les mangroves”. Une situation aussi grave et ayant duré des heures entières n’aurait-elle pas nécessiter l’intervention coalisée de nos forces de défense (terre, mer et aérienne) ?

Comme le choléra, c’est après que Douala soit frappée que les autorités décident de l’élaboration d’un plan d’urgence. Pourtant les attaques de Bakassi et de Limbè n’ont pas fait perdre le sommeil aux hauts gradés de l’armée et à une police désormais reléguée au rang de la circulation routière, de la gendarmerie spécialisée dans le harcèlement des camionneurs, et du Bir expert dans la brimade des populations désarmées. Ainsi dit, des “pirates” entrent en ville, monopolisent toute une partie de la ville pendant des heures, opèrent et prennent le large sans coup férir. Et, au final, de paisibles citoyens perdent la vie à la suite d’une sorte d’indolence et d’apathie des forces de sécurité et de défense.

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