Cameroun : Le Conseil des ministres de pré-campagne électorale de Paul Biya

Un an et 5 mois après le dernier exercice du genre -c’était le 15 octobre 2015-, le président camerounais s'est enfin souvenu de l'une de ses missions régaliennes : la tenue du conseil des ministres.

La concertation avec les membres du gouvernement remanié il y a deux semaines a enfin eu lieu jeudi, servant de prétexte au chef de l'Etat pour ressasser la vieille rengaine des impératifs auxquels doivent s'atteler les membres du gouvernement Philemon Yang : “impératif de poursuivre la mise en œuvre harmonieuse du programme conclu avec le FMI”,  urgence  “de finaliser la mise en œuvre des grands projets structurants, du Plan d'Urgence pour l'accélération de la croissance et du Plan Spécial JEUNES”  et tutti quanti, dans le but de renforcer les performances de l'économie, d'amélioration les conditions de vie des populations et de lutter contre le chômage.

Des adjurations sans lendemain comme on en a que trop souvent entendu  au fil de ses communications publiques, et qui n'en étaient pas moins  nimbées, comme de coutume, d'un zeste d'autosatisfaction, le président  ayant évoqué en termes de ” belles performances” «  l'entrée en service du port en eau profonde de Kribi et du deuxième pont sur le Wouri »…, « ainsi que de nombreux autres (projets, ndlr), qui sont achevés ou en voie de l'être », et qui « peuvent être inaugurés dans l'année en cours ».

La communication présidentielle lors de ce Conseil qui a été très rapidement relayée sur les médias sociaux par ses communicants a cependant laissé de marbre les Camerounais, qui estiment qu'en dehors des portes ouvertes enfoncées et de l'allusion passagère à la volonté des Camerounais  « d'être associées plus étroitement à la gestion des problèmes qui influencent directement leur quotidien », volonté à laquelle il lui semble qu'il a apporté une réponse en créant dernièrement un ministère de la Décentralisation et du Développement Local, leur dirigeant ne s'est pas attardé outre mesure sur les véritables préoccupations de ces concitoyens dont les plus importantes sont la solution pacifique –c'est-à-dire négociée- de la crise sociopolitique aux relents de guerre civile… de sécession, qui prévaut dans les deux régions anglophones où il ne se passe plus de jours sans que soit signalé au moins le meurtre d'une personne.

Passé maître dans l'art de la dérobade et de la fuite en avant, le président camerounais s'est juste contenté d'instruire la poursuite des efforts   en vue du retour à la normale des activités économiques et sociales dans les régions du Nord-ouest et du Sud-ouest en crise, ainsi que dans la région de l'Extrême-Nord en proie aux agressions de la secte terroriste Boko Haram, non sans avoir noté au passage « l'action déterminée de nos forces de défense et de sécurité [qui] a permis de réduire drastiquement les exactions des groupes criminels qui y sévissent. ». Comme s'il suffisait qu'il instruise et brandisse la menace de la baïonnette pour que même les sentiments de révolte se mettent au garde à vous.

Pour le reste, Paul Biya s'est attelé à travers ce Conseil des ministres, le quatrième en six ans (l’antépénultième a eu lieu en 2012, l’avant dernier en 2014 et le dernier en 215) à donner le ton de la future campagne présidentielle : l'encensement de semi-réalisations comme s'il s'agissait d'incroyables exploits. 

Or personne n'est aussi dupe pour ne pas se rendre compte qu'à l'heure du bilan, on est plus que jamais gros Jean comme devant. A sept mois de la fin de son mandat de sept ans, en effet, les grandes réalisations promises en 2011 par l'homme du 6 novembre 1982 sont restées au stade des projets. Et c'est lui-même qui prend soin de le révéler lors du Conseil des ministres de jeudi, en croyant être en train d'embobiner les Camerounais –dans la perspective de la prochaine élection présidentielle- au sujet de sa disposition à travailler pour le bien-être :  « Les services de proximité à la population : eau, électricité, santé, infrastructures routières, doivent continuer à bénéficier de l'attention particulière du Gouvernement, ainsi que je le soulignais récemment dans mon message à la Nation. »

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