Migration : pendant que Niamey et Alger discutent, des migrants encore expulsés d'Algérie vers le Niger


A plusieurs reprises, l’Algérie a été accusée d’expulsions massives et collectives de migrants subsahariens dans le désert nigérien. (Crédits : Reuters)

Alors que se tiennent à Alger, les travaux du comité bilatéral transfrontalier, des centaines de migrants ont été expulsés de l'Algérie vers le Niger selon l'OIM. De quoi raviver les tensions sur cet épineux dossier qui revient sans cesse au cœur des échanges entre les deux pays surtout que sur les questions de la gestion de l'immigration, Alger et Niamey n'ont pas la même vision.

Bazoum Mohamed, le ministre nigérien de l’Intérieur, aurait certainement mieux apprécié que son homologue algérien, Noureddine Bedoui, attende qu’il regagne Niamey pour que la dernière et récente vague d’expulsions des migrants de l’Algérie vers le Niger soit lancée.

Le weekend, pendant que les deux ministres présidaient les travaux du Comité bilatéral transfrontalier à Alger, près de 600 migrants ont été expulsés de l’Algérie vers le Niger. Selon l’Organisation internationale des migrations (OIM) qui rapportait l’information, plus de 300 migrants abandonnés dans le désert nigérien à la frontière algérienne ont d’abord été secourus dans un premier temps et le dimanche 15 juillet, une seconde vague de près de plus de 200 autres migrants a été accueillie à Agadez, la principale ville du nord du pays.

Le dossier de la migration et notamment de l’immigration clandestine était pourtant au cœur des échanges entre les autorités des deux pays voisins, étapes de transit par excellence pour les migrants en provenance des pays d’Afrique de l’Ouest ou du Centre, sur leur route vers l’Europe.

L’Algérie accueille également des milliers “d’exodants” nigériens et depuis 2014, les deux pays ont convenu de conduire des opérations de rapatriement au regard de l’afflux massif de migrants qu’Alger tolère de moins en moins. Si au départ, le processus n’a pas fait de vagues, ce n’est plus le cas depuis quelques mois avec les multiples vagues d’expulsions de migrants africains qu’opèrent les autorités algériennes.

Niamey a été jusqu’à hausser le ton devant le nombre de personnes expulsées et dont la plupart ne sont pas ses ressortissants mais que le pays est obligé de prendre en charge, malgré ses maigres moyens, et avec le soutien de l’OIM.

En février dernier, le ministre nigérien de l’Intérieur a d’ailleurs fait savoir, à l’occasion d’une visite d’un camp de transit pour migrants, que si son pays est « prêt à accueillir tous les nigériens que les algériens ne souhaiteraient plus voir sur leur territoire », il n’est pas question d’accueillir tous les expulsés d’Algérie.

   

« Nous avons eu de longues discussions avec les autorités algériennes à plusieurs reprises, au cours desquelles nous leur avons demandé de ne plus nous renvoyer des jeunes du Mali, de Guinée et d’autres pays. Nous leur avons dit de cesser de nous envoyer des jeunes africains » a affirmé Bazoum Mohamed pour qui « cette situation est déplorable et n’est plus supportable ».

Pomme de discorde

A travers cette opération de refoulement de migrants illégaux qui intervient en pleine visite du ministre nigérien ainsi que de la forte délégation qui l’accompagnait, Alger a voulu certainement montrer à l’opinion internationale les rapatriements des migrants se déroulent en concertation avec les autorités de Niamey et dans le respect des droits humains.

Ce que les autorités algériennes ont toujours soutenu malgré les critiques et indignations d’organisations internationales et même locales qui qui dénoncent une véritable chasse aux migrants comme en mai dernier avec Haut-commissariat des nations unies pour les droits de l’homme(HCDH) qui a demandé à l’Algérie «de cesser les expulsions collectives de migrants, notamment subsahariens».

Des critiques que le ministre algérien de l’Intérieur a encore balayé d’un revers de main. «Nous déployons beaucoup de moyens et nous prenons beaucoup de mesures dans un cadre humanitaire conforme aux valeurs universelles et internationales » s’est contenté de répondre aux journalistes, Noureddine Beddoui lors de la conférence de presse qu’il a conjointement animé avec son homologue nigérien, ce lundi en marge des travaux du comité bilatéral transfrontalier, lesquels prennent fin ce mardi 17 juillet dans la capitale algérienne.

A propos des critiques sur les mauvais traitements infligés aux refoulés, le ministre algérien a aussi dénoncé « une campagne non constructives et infondées. L’Algérie a toujours soutenu les migrants africains et n’a ménagé aucun effort, notamment au plan humanitaire, pour leur portant aide et assistance ».

Malgré le semblant de convergence de points de vue sur la problématique qu’affichent publiquement les autorités d’Alger et de Niamey, le dossier de l’immigration constitue encore la pomme de discorde entre les deux pays. Il faut dire que cette question, le régime de Mahamadou Issoufou n’a pas la même approche que le pays d’Abdelaziz Bouteflika. Alors que les autorités nigériennes ont accepté d’accueillir des centres de rétention et de transit pour migrants à la demande des pays européens et moyennant des millions d’euros de financement, l’Algérie refuse toujours d’accueillir de tels sites.

   

«Notre pays a exprimé son refus d’ouvrir des centres de rétention pour les migrants illégaux. Je pense qu’on a été clair. La position de l’Algérie est connue » a d’ailleurs réitéré Noureddine Beddoui ce lundi à Alger.

Avec cette nouvelle vague de refoulement de migrants vers le Niger, l’Algérie n’entend point changer d’approche sur la question au grand dam de Niamey qui va encore devoir consentir d’énormes sacrifices pour gérer le flux de migrants en transits qui s’ajoutent à ceux expulsés par son grand voisin du nord ainsi que la vague de réfugiés en provenance d’autres contrées.

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