Bibi Ngota un an après: Qu’est devenu le mémorandum des journalistes ?

Cela fait exactement 365 jours que le directeur de publication de Cameroun Express est mort en détention à la prison centrale de Kondengui. Les questions soulevées par la presse camerounaise après cette tragédie restent non résolues.

Dans la nuit du 21 au 22 avril 2010, Bibi Ngota rendait l’âme à l’infirmerie de la prison centrale de Kondengui de Yaoundé. Ce, après avoir été incarcéré un mois avant en compagnie de Serges Sabouang, directeur de publication de “ La Nation  ” et Robert Harris Mintya, directeur de publication de “ Le Devoir ” pour l’affaire des commissions de l’achat du bateau-hôtel Rio del Rey. L’opinion publique se montrait particulièrement choquée par les conditions troubles de la mort du journaliste qu’on disait avoir séjourné et torturé aux services  d’espionnage, puis  laissé à lui-même en prison sans assistance médicale appropriée. La presse nationale tirait la sonnette d’alarme sur les conditions de travail des journalistes, la répression sauvage des délits de presse et choisissait de se remobiliser pour conquérir plus d’espace de liberté.

L’expression de cette volonté de conquête était la manifestation du 03 mai 2010 prévue devant les services du Premier ministre, à l’occasion de la journée internationale de la liberté de la presse. Elle fut interdite par l’autorité administrative. Les centaines de journalistes qui avaient bravé ce verrou, en  essayant de passer le cordon de sécurité installé autour d’eux, sur le terrain vague servant de check-point en face du Hilton Hôtel de Yaoundé, avaient barbarement été bastonnés par la police et la gendarmerie. Mais malgré l’adversité, le mémorandum destiné pour le Premier ministre sera quand même lu sur place.

Un an après, l’Union des journalistes du Cameroun (Ujc) déplore que rien n’ait été fait dans le sens de la mise en œuvre des propositions faites par les journalistes. Au contraire, cette organisation déplore  l’indifférence du Premier ministre, Yang Philemon, vis-à-vis de l’ensemble des sollicitations de la presse. Pourtant avec tous ses prédécesseurs “ l’Ujc pouvait solliciter et obtenir un rendez-vous, poser les problèmes du secteur de la presse au moyen d’un Mémorandum par exemple. C’est ainsi que le Conseil exécutif de l’Ujc présidés par M. Vamoulké Amadou et M. Lingo Célestin ont pu déposer des memoranda au sujet notamment de la libéralisation du secteur de l’audiovisuelle ou de l’accès des journalistes aux sources publiques d’informations, mais depuis le dépôt le 21 avril 2010 du mémorandum dans les Services du Pm, il n’y a pas eu ne serait-ce qu’un accusé de réception ”, se plaint Christophe Bobiokono, secrétaire exécutif de l’Ujc. Autrement dit, les requêtes des journalistes sont restées lettres mortes.

Si du côté des pouvoirs publics, rien n’est fait en faveur de ce mémorandum, au niveau international des voix se font entendre appelant à plus de champ de liberté pour les journalistes camerounais. C’est dans cette veine que  le 22 avril 2011, date anniversaire de la mort de Bibi Ngota, le comité pour la protection des journalistes siégeant à New – York dénonce la répression des journalistes qui enquêtent sur la corruption. Pour cette organisation qui a saisi Paul Biya par écrit, “ le gouvernement du Cameroun doit engager des réformes pour permettre aux journalistes de faire des reportages ou mener des enquêtes sur des questions d’intérêt public sans crainte de représailles ”.

Focal: Substance du Mémorandum

· La révision de la loi n°90/052 du 19 décembre 1990 portant sur la liberté de communication sociale avec entre autres une définition claire du statut du journaliste, une énumération et une définition exhaustives des délits de presse ;

· La suppression des peines privatives de liberté à l’encontre des journalistes pris en défaut dans l’exercice de leur profession au profit des peines civiles ;

· L’application rigoureuse des dispositions de la loi n°90/052 du 19 décembre 1990 qui garantissent aussi bien l’inviolabilité des rédactions que l’accès aux sources d’information ;

· La codification de la cyberpresse ;

· La codification du statut du journaliste étranger et du statut de l’entreprise de presse étrangère au Cameroun ;

· La création et la promotion de la fonction de porte-parole à la présidence de la République et dans les services du Premier ministre.

· La réorganisation de la commission de la carte de presse et de tous les organes qui gèrent les problèmes de la presse, à l’instar du Conseil national de la communication qui devrait devenir une haute autorité,

. L’application effective de la convention collective  nationale des journalistes et des professionnels des métiers connexes de la communication sociale au Cameroun ; la mise en place d’un régime fiscal spécial pour l’entreprise de presse au Cameroun:

. L’application effective de la loi sur la publicité dans le sens d’une répartition plus rationnelle et plus équitable des budgets publicitaires entre les entreprises nationales d’une part et entre les entreprises nationales et étrangères d’autre part.

. L’augmentation substantielle de l’enveloppe de l’aide à la presse, et surtout la définition claire par une commission paritaire, des critères d’éligibilité des entreprises de presse à cette subvention. L’actuelle commission du ministère de la Communication ayant montré ses limites ;

. La mise en place à terme d’un fonds de développement de la presse.

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