Lundi 16 mai prochain, une quinzaine de journalistes français débarquera à Yaoundé dans le cadre des manifestations relatives à la fête nationale du 20 mai.
Ces journalistes, triés sur le volet, et issus, pour la plupart, de la presse quotidienne et hebdomadaire française, ont été contactés par les soins d’une officine de communication basée en Suisse. Pour l’instant, les journalistes bénéficiaires de ce voyage de presse n’ont pas encore reçu une feuille de route précise. Mais, une chose est sûre, leur rôle, pendant et à l’issue de leur séjour au Cameroun, est de polir l’image du pays et celle de son chef, Paul Biya (78 ans, 28 ans au pouvoir), dans la perspective de sa candidature probable à l’élection présidentielle d’octobre prochain.
Les quinze journalistes français bénéficieront, pendant leur séjour d’une semaine, du gîte et du couvert, d’un chauffeur pour des balades bien encadrées, tout cela aux frais du contribuable camerounais.
Dans la foule de communicants français (Patricia Balme, Stéphane Fouks, etc.) qui s’étripent pour bénéficier d’une part du prodigieux budget que le Cameroun engloutit pour sa propagande internationale, Stratline communication semble avoir le vent en poupe. Cette agence de Com basée en Suisse et à Paris est dirigée par Yasmine Bahri Domon, une ancienne de Jeune Afrique. Sur le site internet de Stratline, les réalisations récentes sur le Cameroun sont nombreuses : publi-reportages parus dans Le Monde, Le Figaro, Fortune magazine, Trends, Valeurs Actuelles, Le nouvel Economiste, Strategos, New African, Middle East, etc. En mai 2008, Stratline avait déjà offert au président Paul Biya quatre pages de publi-rédactionnel dans Le Monde pour expliquer sa campagne anti-corruption et la réforme constitutionnelle qui lui permettait de briser le verrou de la limitation des mandats à la tête de l’Etat. Le Cameroun, si on s’en tient au site internet de Stratline, semble être un bon terrain de chasse pour cette entreprise.
Joint au téléphone hier, Yasmine Bahri Domon(photo) n’a ni confirmé, ni infirmé être à l’origine du voyage de presse de la semaine prochaine avec 15 journalistes français. Manifestement embarrassée, elle s’est plutôt contentée de savoir d’où venait l’information et s’est défendue de se livrer à une quelconque propagande. « Ce que nous faisons, c’est de la communication économique Monsieur. Nous essayons de travailler pour le Cameroun », a-t-elle dit.
Avec la même finesse, Yasmine Bahri Domon affirmait déjà dans une interview parue dans Les Afriques, qu’elle est venue travailler en Afrique pour des raisons personnelles. Et d’ajouter : « Je suis viscéralement attachée à ce continent et à ses peuples, à ses potentialités énormes, à ses atouts… A l’instar d’Alain Peyrefitte qui, dès les années 70, l’annonçait pour la Chine, je suis intimement persuadée qu’un jour, pas si lointain, « l’Afrique s’éveillera ». »
Cette nouvelle opération de charme sur le Cameroun intervient deux mois après celle de mars dernier, lorsqu’une agence de communication américaine, Epic Global Media, appuyée par l’ambassade du Cameroun à Washington, avait réalisé des publi-reportages pour vanter le Cameroun de Paul Biya, probable candidat à sa propre succession en octobre prochain.