Affaire Edzoa-Atangana: Paul Biya cité au tribunal

Afin de prouver la légitimité et la légalité des activités du Copisur, Michel Thierry Atangana a plusieurs fois brandi des actes et des discours du chef de l’Etat.

Le temps d’une audience qui a duré environ 2 heures et demi, hier 15 juin 2011, on aurait cru que la principale salle d’audience de la Cour d’appel du centre requise pour les besoins de la cause par le tribunal de grande instance du Mfoundi – Centre administratif s’est transformée en amphithéâtre d’une faculté d’économie.  Tant le témoin auditionné a axé son propos sur les paradigmes économiques employés dans les années 1990 par le gouvernement camerounais pour pallier le marasme économique subséquent à la crise de la fin des années 1980.

Laquelle crise économique et les  accords avec le Fmi découlant  auraient poussé, le président de la République à créer le Comité de pilotage et de suivi de la construction des axes routiers Yaoundé – Kribi et Ayos – Bertoua (Copisur). Projet pour lequel Michel Thierry Atangana (président du Copisur) et Titus Edzoa (ex-secrétaire général de la présidence de la République ) sont principalement accusés de détournement, tentative de détournement, et trafic d’influence dont les effets en termes de pertes financières sont évaluées à 63 milliards Fcfa.

Programme d’ajustement structurel

De l’aveu de maître Ngoupa, au cours de l’audience, les explications construites sur des rudiments entièrement techniques visent à démonter l’argumentaire de l’accusation qui avait voulu en son temps, présenter le président du Copisur et l’ex-secrétaire général à la présidence de la République comme les orchestrateurs d’un machin  pour faire main basse sur la fortune publique. Et pour tenter d’en administrer la preuve du contraire, Michel Thierry Atangana a cité une dizaine de fois le président de la République notamment   lors discours où il faisait des promesses en infrastructures routières à la  nation.

L’un des premiers c’est un propos tenu en 1995. Paul Biya y reconnaissait la lenteur dans la réalisation des chantiers suscités mais annonçait le lancement du premier tronçon de la route Yaoundé –Kribi et le lancement des études du deuxième tronçon.  Dans le même sillage, l’accusé- témoin évoque le discours  qu’avait prononcé le président lors de l’inauguration de la plate-forme d’Eboney. Il y promettait entre autres construction de routes, celle de Yaoundé -Kribi.

Puis, replongeant dans le contexte économique marqué par la détérioration des termes de l’échange et donc, la baisse du taux de croissance puisque les produits du commerce international venus des pays du tiers monde se vendaient aux prix bas, contraignant ainsi ses dirigeants au Programme d’ajustement structurel  (Pas) essentiellement prohibitif pour l’investissement, Michel Atangana rappelle une interpellation  de Paul Biya faite aux membres du corps diplomatique le 28 décembre 1987. « La crise s’est accentuée à cause de l’alourdissement du service de la dette la baisse des cours du dollar. Si les matières premières étaient payées à juste prix, de nombreux pays du tiers monde régleraient leur dette », plaidaient le président de la République. Le témoin cite également des messages du chef de l’Etat à la Nation au cours de l’année 1994. Celle de la création du Copisur. Pour l’essentiel, Paul Biya se plaignaient de l’accélération de la crise économique, le taux d’inflation galopant et annonçait une réduction des salaires du personnel de l’Etat.

Jean Lefebvre

Selon les avocats de la défense, ces explications relevant de la macroéconomie, avaient pour but de rafraîchir la mémoire du tribunal sur le contexte social, économique et politique des années 1990. Car, selon les rapports de l’expert commis par le parquet, cette situation était royalement éludée. Pis, ce dernier n’avait jamais pu rencontrer leur client pour qu’il puisse éventuellement attirer son attention sur ces aspects.  Sur ces entrefaites, la défense invite son client à préciser le champ d’action et la mission du Copisur. Là également, le témoin évoque un acte du président de la République. Il s’agit de l’arrêté 149 pris en 1994, portant création du Copisur. Sa quintessence révèle que l’organe rattaché au secrétariat général à la présidence de la République est chargé de concert avec l’administration de la recherche des entreprises, de la mobilisation des ressources pour la conduite des projets routiers avec l’appui de partenaires en fonction des besoins.

Parmi ces partenaires, on compte Texaco, Mobil, Shell, Nestlé, Gtm, Dunnes, ou encore Jean Lefebvre, employeur de Michel Thierry Atangana. Cette dernière entreprise, confie le témoin-accusé, avait commencé le remboursement de la Tspp (Taxe sur les produits pétroliers) reversée au Copisur par les entreprises pétrolières. Subtilement l’accusé indique ainsi, qu’étant sous ajustement structurel, le Cameroun devait procéder par ce type de montage financier pour s’offrir des infrastructures routières à hauteur 352 milliards Fcfa, conformément aux promesses présidentielles. Ce, sans se faire taper sur les doigts par le Fmi pour qui la richesse devait être essentiellement au service de la dette. Michel Atangana dira regretter que, pour avoir respecté les directives du président en trouvant les financements, il sera jeté en prison.  L’audience est suspendue sur ce regret. Elle reprendra le 29 juin 2011 toujours en présence d’un émissaire de l’ambassade de France, représentée hier par le chef de la section consulaire.

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