Non séparation des pouvoirs, frein au développement durable: Cas du Cameroun

La séparation des pouvoirs fait allusion au concept de la démocratie. Dans les lignes qui suivent, nous voulons analyser l’impact de la non séparation des pouvoirs sur le développement durable en Afrique.

La démocratie est-elle sans rapport avec le développement durable ?

Plusieurs rapports des Nations-Unies soutiennent que la démocratie et le développement durable sont deux concepts qui sont intimement liés. L’un a besoin de l’autre pour se consolider. Un rapport récent de l’UNESCO affirme : « Pour se consolider, la démocratie politique doit trouver son prolongement dans des mesures économiques et sociales qui favorisent le développement, de même que toute stratégie de développement a besoin, pour être mise en œuvre, d’être validée et renforcée par la participation démocratique. »

Par conséquent, la démocratie c’est-à-dire le pluralisme idéologique, le respect des droits et libertés des personnes, la justice sociale sont des valeurs qui créent des conditions optimales pour le développement durable dans un pays. Autrement dit, il est plus difficile d’avoir un développement durable dans un pays où l’état ne respecte pas les droits et libertés des personnes et ne garantit pas la justice sociale aux citoyens. Selon les Nations-Unies, sans la paix, il ne saurait y avoir ni démocratie, ni développement, ni même expansion du commerce, investissement et croissance économique.

La séparation des pouvoirs

Elle est un des facteurs clés de succès pour un développement durable. Les pays riches qui ont connu également dans le passé des instabilités économiques, sociales et politiques ont compris qu’il faut mettre en place des institutions indépendantes, c’est-à-dire une séparation des pouvoirs qui garantissent les droits et libertés des personnes, appliquent la justice et assurent la sécurité aux citoyens. Aujourd’hui ces pays jouissent d’une stabilité politique certaine et procurent une meilleure qualité de vie à leurs populations. Ces bonnes pratiques, qui ont démontré leur efficacité, devraient être reprises et appliquées dans les pays Africains.

Les Chefs d’états Africains devraient apprendre de leurs erreurs et de celles de leurs homologues qui infligent inutilement des souffrances à leurs peuples qu’ils sont censés protéger et garantir leur épanouissement. Ils devraient s’assurer de ne pas persister dans leurs erreurs au risque de subir la sentence de l’histoire contemporaine et future.




La séparation des pouvoirs consiste en la répartition des différentes fonctions de l’État. Par ce principe, les fonctions de l’État sont confiées à différentes composantes de celui-ci. L’objectif de cette séparation des pouvoirs est d’avoir des institutions étatiques qui tout en se contrôlant et s’équilibrant mutuellement du fait de leur indépendance, garantissent au mieux le respect des droits et libertés des individus, la justice et la sécurité à tous.
Aussi la séparation des pouvoirs est aujourd’hui un élément fondamental des régimes réellement démocratiques dans le monde. Historiquement, il existe 3 types de pouvoir :

•    le pouvoir législatif, confié à un parlement élu par le peuple (députés ou législateurs) dont le rôle supposé est de créer les lois ou voter les lois proposées par le pouvoir exécutif après des éventuels amendements.
•    le pouvoir exécutif, confié à un gouvernement composé d’un premier ministre et des ministres; et à la tête duquel se trouve un chef d’État et/ou de gouvernement. Le pouvoir exécutif a pour rôle de veiller à l’application des lois votées par le parlement.
•    le pouvoir judiciaire, communément appelé troisième pouvoir, est confié aux magistrats, procureurs et avocats. Son rôle est de trancher tous les litiges dont il est saisi en disant la loi.
Dans la majorité des états Africains, ces 3 pouvoirs sont représentés, mais ne fonctionnent pas correctement.

Les origines des dictatures

Dans le principe, il doit y avoir une indépendance totale entre les pouvoirs, un équilibre permettant que chaque pouvoir limite les pouvoirs de l’autre et un contrôle réciproque permettant qu’un des pouvoirs ne viole pas les droits et libertés des personnes. Le pouvoir judiciaire doit être assez fort pour ne subir aucune pression de la part du législatif et de l’exécutif afin qu’il applique sereinement une justice équitable à tous les citoyens, aux personnes morales et aux institutions qui le saisissent. Si une seule personne ou un groupe restreint de personnes concentrent en leurs mains tous les pouvoirs de l’État, il y aura risque d’abus de pouvoir et la dictature s’installe. En effet, tout homme ou femme qui a du pouvoir est porté à en abuser jusqu’à ce que des limites lui soient imposées par le système.

Force est de constater que dans la majorité des pays Africains, il n’y a pas de véritable séparation des pouvoirs. Les pouvoirs législatifs et judiciaires sont à la solde de l’exécutif (Président de la république). Par conséquent, les pouvoirs se trouvent souvent concentrés entre les mains d’une seule personne qui dirigent le pays comme bon lui semble et instaure la dictature.

Comment éradiquer les dictatures

Pour s’assurer un développement durable, les pays Africains devront donc œuvrer pour mettre en place une réelle séparation des pouvoirs. La mise en place des institutions fortes et indépendantes permettra aux Africains de se prendre en charge et d’être responsables de leurs propres destins. Ceci donnerait alors moins de prétextes aux pays occidentaux pour s’ingérer dans leurs affaires souvent dans le seul but de protéger et de pérenniser leurs intérêts hégémoniques et économiques. Le monde est un village planétaire dans lequel les pays devraient avoir des relations d’affaires dans le but de procurer une meilleure qualité de vie à leurs peuples respectifs. Aucun pays ne pouvant vivre en autarcie et satisfaire totalement tous les besoins de son peuple, une symbiose qui garantit une relation à bénéfice réciproque (gagnant-gagnant) entre les pays est donc plus que souhaitable.

Le monde a changé. Aujourd’hui les peuples ne se soucient pas seulement de leur sécurité alimentaire (besoins primaires) mais ils ont aussi besoin que leurs droits et libertés soient respectés. Les leaders qui ne l’auront pas compris vont malheureusement rater le train de l’histoire.




Si les pays Africains veulent être respectés et entretenir des relations d’affaires équitables, dans lesquelles leurs intérêts seront sauvegardés, avec les autres États souverains dans le monde, il faudrait qu’ils commencent par mettre de l’ordre chez eux. Le monde a changé. Aujourd’hui les peuples ne se soucient pas seulement de leur sécurité alimentaire (besoins primaires) mais ils ont aussi besoin que leurs droits et libertés soient respectés. Les leaders qui ne l’auront pas compris vont malheureusement rater le train de l’histoire.

On peut parfois comprendre que les pays occidentaux interviennent pour protéger les vies humaines dans les pays où les dictateurs bafouent les droits et libertés des personnes, entravent la justice, ordonnent aux forces de l’ordre de tirer sur leurs propres populations dans le but de se maintenir au pouvoir sans tenir compte des aspirations de leurs peuples.

Nous avons connu récemment les cas dramatiques de la Tunisie, Égypte, Syrie, Yémen, Lybie. On peut se poser la question légitime pourquoi ont-ils intervenu en Lybie et pas en Syrie ni au Yémen ? (2 poids 2 mesures probablement pour des raisons stratégiques /géopolitiques…Ne soyons pas dupe, il n’y a pas que les raisons humanitaires qui motivent les occidentaux mais il y a surtout les intérêts hégémoniques et économiques… C’est la vie. Nous vivons dans un monde des affaires…où chaque pays doit savoir protéger ses intérêts). En ce qui concerne la Libye, Kadhafi a développé son pays et offert à son peuple une meilleure qualité de vie comparativement à d’autres pays d’Afrique. Malheureusement sur le plan du respect des droits et libertés des personnes, justice sociale, il ne semble pas avoir été à l’écoute des aspirations de son peuple. Nous connaissons tous la suite….

Les dirigeants Africains doivent comprendre la nécessité de mettre en place des institutions indépendantes avec une véritable séparation des pouvoirs qui garantira une bonne gouvernance. Les maux qui caractérisent les pays où il n’y a pas de séparation des pouvoirs, corollaire indispensable d’une véritable démocratie (corruption, pauvreté, faible croissance économique, insécurité, manque d’infrastructure de santé, éducatives, routières, etc.) auront tendance à disparaître avec la mise en place d’une séparation des pouvoirs effective. Chaque pouvoir exercera alors un contrôle sur l’autre afin de s’assurer de sauvegarder l’intérêt supérieur de la nation.

Cas du Cameroun

Certains pays Africains, à l’instar du Ghana, ont compris ce principe de bonne gouvernance et sont en voie de faire partie de la liste des pays émergents d’ici quelques années. En revanche les pays comme le Cameroun traînent lourdement leurs pieds dans le dossier de la bonne gouvernance. En conséquence, ce pays s’est considérablement appauvri, faisant son entrée dans le club des pays pauvres très endettés (PPTE) sous le règne du Président Paul Biya. Le Cameroun est pourtant doté de richesses naturelles et humaines considérables. À mon humble avis, l’absence d’une véritable séparation des pouvoirs en est la principale cause.

Les dés paraissent déjà pipés pour l’élection présidentielle prévue le 9 Octobre 2011 (si elle a lieu…) car le pays ne s’est pas doté des institutions indépendantes qui garantiront des élections justes, transparentes et équitables. Voici un bon prétexte donné aux occidentaux pour s’immiscer dans les affaires intérieures du Cameroun; En effet le cas du Cameroun pourrait représenter un risque d’instabilité dans la sous-région d’Afrique Centrale à la suite de nombreuses contestations des résultats de cette élection présidentielle.

En tant que Camerounais, je rejette toute forme de guerre qui cause des souffrances aux êtres humains  et détruit tout autour de nous. Je prône l’amour, la sagesse humaine et l’espoir. C’est la raison pour laquelle, Je prie le Président Paul Biya de prendre le courage de parler à son peuple, de reconnaître ses erreurs. Paul Biya devrait faire comprendre à son peuple qu’il a géré le Cameroun au meilleur de ses compétences et en tenant compte du contexte mondial. Mais l’heure est venue pour lui d’annoncer à ses citoyens sa retraite de la vie politique après près de 30 ans de règne. Une telle décision constituerait une sortie historique et honorable pour l’intérêt supérieur de la nation. Et je suis convaincu que la majorité des Camerounais applaudiront cette décision et pardonneront à leur leader ses erreurs et manquements passés.

Compte tenu des délais courts qui ne permettent pas d’organiser des élections transparentes, justes et équitables, la date de l’élection présidentielle du 9 Octobre 2011 devrait être reportée de 6 mois.  La loi électorale devra être révisée par une commission crédible et indépendante dont l’un des mandats sera de proposer une refonte totale d’ELECAM (ÉLEction CAMeroun est un organe crée par le pouvoir en place, chargé d’organiser les élections au Cameroun.

Cet organe jugé trop proche du pouvoir est critiqué par les partis d’opposition et certains représentants de la société civile) afin qu’il soit représentatif de toutes les sensibilités politiques, incluant les représentants de la société civile. Un nouveau président devra être élu démocratiquement par tous les Camerounais de l’intérieur et de l’extérieur sans distinction (reconnaissance de la double nationalité), sur la base de son programme de société et non sur une base ethnique ou corporatiste. Une des priorités de ce nouveau leader devra être de mettre en place une véritable séparation des pouvoirs. Il devra œuvrer pour changer les mentalités de ses concitoyens (encourager l’esprit d’amour pour son pays) et assurer un développement durable du pays. Les Camerounais devront apprendre à dire avec John F. Kennedy « Ne demande pas ce que ton pays peut faire pour toi, demande ce que tu peux faire pour ton pays. » La constitution devra être révisée à nouveau pour ramener la durée du mandat présidentiel à 5 ans renouvelable une seule fois.

Par ailleurs le nouveau Chef de l’état devra créer une commission de réconciliation nationale comme Nelson Mandela l’a fait en Afrique du Sud en son temps, afin de permettre aux Camerounais de tourner la page de l’ère Paul Biya sans rancune ni vengeance, les exhortant à se remettre au travail pour assurer un avenir meilleur aux générations actuelles et futures.

Les Chefs d’états Africains devraient apprendre de leurs erreurs et de celles de leurs homologues qui infligent inutilement des souffrances à leurs peuples qu’ils sont censés protéger et garantir leur épanouissement. Ils devraient s’assurer de ne pas persister dans leurs erreurs au risque de subir la sentence de l’histoire contemporaine et future.

Charles Tamba

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