Cameroun. Polémique sur les visas d’entrée en Côte d’ivoire

De nombreux usagers en quête de visas pour la Côte d’Ivoire accusent le nouvel ambassadeur de cette représentation diplomatique de fermer les portes de son pays aux ressortissants camerounais. Pour sa part, le diplomate ivoirien évoque l’implémentation des réformes visant à améliorer le service dans cette chancellerie.

C’est un ciel brumeux entre les usagers camerounais en quête de visas pour la Côte d’ivoire et l’ambassadeur de ce pays à Yaoundé. Pour la plupart, les Camerounais sollicitant des visas d’entrée en Côte d’Ivoire se plaignent des conditions d’obtention du «précieux sésame». Un requérant de visa  ayant requis l’anonymat estime que le nouvel ambassadeur de Côte d’Ivoire « prend du plaisir à refuser systématiquement des visas d’entrée en terre ivoirienne ». Son de cloche identique chez Gérard. Cet opérateur économique évoque les mêmes récriminations que nombre d’usagers de cette représentation diplomatique énoncent.

En clair, ces sources dénoncent entre autres l’exigence de présentation d’un billet d’avion lors de l’introduction de la demande de visa pour la Côte d’Ivoire, d’une lettre d’invitation ou d’un certificat d’hébergement «certifié dans une mairie ivoirienne» comme l’exige le formulaire physique de l’ambassade, depuis l’arrivée du diplomate Dosso Adama à la tête de cette ambassade. En outre, les usagers s’étonnent de l’exigence des travellers chèques dans la composition du dossier. Une mesure qui met en rogne nombre d’usagers. «Il n’est plus possible d’obtenir un traveller chèque au Cameroun depuis quelque temps.» Pis, certains hommes d’affaires camerounais installés en Côte d’Ivoire dénoncent le mépris des investissements effectués en terre ivoirienne.

L’un d’eux affirme avoir perdu des sommes importantes lors de la crise. «J’ai perdu au moins 150 millions de francs en Côte d’Ivoire pendant la crise postélectorale.» La même source précise avoir payé ses employés durant la crise. «Il a fallu que j’use de moyens informels pour payer mon personnel ivoirien parce que les banques étaient fermées.» Conséquence, ce chef d’entreprise a décidé d’arrêter tout transfert de fonds destiné au paiement des salaires de ses employés ivoiriens tant que ma situation n’est pas mise au clair.
 
«Souci de traçabilité»

Rencontré, Dosso Adama met ces changements d’habitude à l’ambassade de Côte d’Ivoire à Yaoundé sur le compte des réformes visant à donner plus de lisibilité au processus de délivrance de visa. Selon le diplomate, «Lorsque je suis arrivé ici, j’ai demandé à chaque service de l’ambassade de me faire un rapport. Sur cette base, j’ai constaté que avant, les usagers demandeurs de visas entraient directement dans l’ambassade et allaient immédiatement se mettre en contact avec les services consulaires. Les gens entraient et sortaient comme ils voulaient. C’était une véritable foire.» Raison pour laquelle le nouveau patron de la représentation ivoirienne au Cameroun a décidé de construire une salle à l’entrée.

«Une salle que j’ai équipée de tables et de fauteuils qui permettent aux demandeurs de visas de s’installer, de remplir les formalités, et autres. Après quoi, les services compétents rassemblent les passeports pour traitements. Il n’est donc pas vrai que l’on disent que les demandeurs de visas sont reçus à la guérite.» Une initiative que les usagers camerounais placent sur le prisme d’une méprise à leur égard.

Evoquant par la suite le fait que les frais consulaires qui s’élèvent à 50 mille sont versés dans un compte bancaire d’une banque de la place, l’ambassadeur Dosso explique que c’est par souci d’impulser une traçabilité dans la gestion de ces fonds.  Le diplomate ivoirien indique : «J’ai trouvé ici que tous les frais consulaires étaient payés, puis gardés sur place à l’ambassade. J’ai trouvé cela pas moderne du tout. Tous les demandeurs de visas ont le numéro de compte. Ils payent à la banque et cela permet de vérifier que cela a effectivement été fait.».

Les usagers en quête de visa d’entrée en Côte d’Ivoire évoquent une différence entre la liste des pièces exigées par le formulaire électronique de cette représentation et celui obtenu dans les services de cette représentation diplomatique à Yaoundé. Toute chose que réfute l’ambassadeur qui  conteste aussi le reproche de refus systématique d’octroi de visa.

Adama Dosso explique que «Ceux-qui voient leurs dossiers rejetés, sont ceux là qui n’ont pas rempli les conditions.» Il précise en outre que les visas délivrés par sa représentation sont biométriques. «Leur attribution est gérée à partir d’un système informatisé depuis Abidjan.» Précise la source.

«Vous avez des gens qui déposent un dossier avec des photos différentes. Ou encore des gens qui vous disent qu’ils vont en Côte d’Ivoire faire du tourisme. Lorsqu’on leur demande s’ils ont des réservations d’hôtels, ils vous donnent des numéros de téléboutiques.» Quid des hommes d’affaires régulièrement installés dans ce pays?  Pour l’ambassadeur, il s’agit pour son pays d’assurer la sécurité de ses convives.

«Lorsqu’on demande que les invitations soient certifiés par une mairie ivoirienne, c’est pour des problèmes de sécurité pour les voyageurs qui vont en Côte d’Ivoire. Il faut bien que l’on sache où est ce que vous allez et si ce sont des endroits connues et identifiables des autorités municipales de Côte d’Ivoire. Voilà la raison pour laquelle nous exigeons que les invitations adressées à des personnes qui doivent aller en Côte d’Ivoire soient certifiées des mairies de notre pays.» Précise Adama Dosso.

En conclusion, l’ambassadeur de Côte d’Ivoire se veut rassurant sur les intentions de son pays vis-à-vis du Cameroun. Tout en se référant à un récent entretien avec le chef de l’Etat camerounais, Adama Dosso affirme que «le Cameroun et la Côte d’ivoire sont deux pays siamois. Ils entretiennent des relations amicales et fraternelles que nous sommes là pour consolider. Lorsque j’ai rencontré le président Paul Biya il y a quelques jours, il m’a signifié la considération qu’il avait pour mon président. Je ne peux donc pas faire en sorte que les relations entre nos deux pays soient mauvaises.  Au contraire».

Jean François CHANNON / Joseph OLINGA

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