Par solidarité de corps, ce jeune homme a été brûlé vif par des motos-taximen après qu’il ait poignardé à mort leur collègue. C’était hier dimanche aux premières heures de la matinée à l’intercession Ndokoti – palais de Justice et Ndogpong à Douala.
« Ça, les Camerounais ont le cœur !» Ainsi s’exclamait un « spectateur » devant la scène macabre et insoutenable qu’il y avait dans son champ de vision. Il est 7h00 ce dimanche matin 18 mars 2012, le carrefour est bondé de monde, surtout des engins à deux roues. Dans le cimetière qui jouxte une entreprise de transport urbain, juste à un jet de pierres du palais de justice de Ndokoti, des personnes sont agglutinées. Aussitôt arrivé sur les lieux, c’est l’odeur de chair brûlée qui frappe l’odorat. A l’entrée du cimetière de Ndokoti, le corps calciné d’un jeune homme, dépouillé des vêtements, gît à côté d’une pierre tombale. Le macchabée brûle encore, avec la puissance des flammes, la partie inférieure du pied gauche a été dissociée du reste de la jambe. Le fémur carbonisé est visible comme ne le sont pas les parties génitales.
Pendant ce temps, les motos-taxis ne décolèrent pas. Ils attisent davantage le feu et veulent « voir les cendres de la dépouille se consumer et disparaître». Théo, le plus actif, la vingtaine à peine entamée, et son « ami », vont donner le coup de grâce. Ces deux jeunes gens vont installer un foyer sur la face du défunt. Brindilles, planches et quelques gouttes d’essence sont mises à contribution. Et voilà le feu qui reprend de plus belle. Le spectacle est inouï. L’horreur atteint son paroxysme lorsqu’on suit au milieu des flammes des quintes d’explosion : « Ce sont ses yeux qui ont éclaté» assène le collègue d’infortune de Théo. Curieusement, personne dans la foule n’ose s’interposer. A ceux qui sollicitent la pitié des « benskineurs (motos-taxis) », Théo a sa formule : «Même les policiers qui étaient-là non rien pu faire » avance-t-il comme pour dissuader toute velléité d’intervention.
Terré tel un rat
Approché par Le Messager, le « leader » de la meute des benskineurs, Théo confie les raisons de la détermination dont il fait montre dans sa sinistre besogne : «Cet homme aidé par un complice qui a pris la fuite, ont agressé et tué l’un des nôtres. Etant moi-même benskineur, j’aurai pu y passer.» Selon lui, c’est aux environs de 4h que les deux agresseurs vont mettre le grappin sur un conducteur de moto. Objectif, s’emparer de l’engin. Seulement, dans leur entreprise, il y aurait eu en dehors de la résistance de la victime, la présence fortuite d’un camion d’Hysacam. Ces deux éléments seront déterminants pour la suite. Quand le camion s’immobilise et braque les phares sur la scène, l’un des agresseurs va prendre la poudre d’escampette laissant son acolyte retenu par l’agressé.
Alertés, les motos-taxis qui garent habituellement à la station service Tradex non loin de là, vont accourir. Sachant sa vie en danger, le présumé agresseur va poignarder par deux fois sa victime et escalader le mur du cimetière. Ce qui ne va pas décourager ses traqueurs dont certains policiers. Ceux-ci, au bout d’un quart d’heure, vont finalement le retrouver au fonds de la nécropole, terré tel un rat au milieu des bananiers. Informés du décès de leur « collègue » conduit dans un hôpital de la place, les motos-taximen n’auront plus une autre option que de brûler vif cet homme. Au moment où nous quittions les lieux (8h40), les restes de cet inconnu n’avaient de cesse de consumer.
Jacques Willy NTOUAL