Centrafrique. François Bozizé, « Choix du Peuple » en 2016

Chronique annoncée du viol de la Constitution centrafricaine

Thierry NdoyoArrestation arbitraire de Thierry Ndoyo (Photo ci-contre), coordinateur général du collectif «Touche pas à ma constitution», par le Commissaire de l’aéroport de Bangui.

Résidant au Sénégal, il rentre à Bangui pour enterrer son petit frère, et serait en ce moment-même détenu dans une cellule à l’Office central de Répression du Banditisme (ORCB).

Force est de conclure donc qu’en République centrafricaine, vouloir protéger la Constitution de son pays contre la prédation sans limite d’un régime aux abois, est dorénavant considéré comme du banditisme. En exerçant une force asphyxiante qui ne surprend plus personne, expression brute d’un diabolisme abyssal, François Bozizé continue donc à tuer l’espoir de milliers de Centrafricains.

Le 13 août dernier à Paris, un nouveau front s’est officiellement ouvert contre la tyrannique et profondément destructrice gouvernance du général-président François Bozizé.

Lors de l’illustre allocution présidentielle, à l’occasion de la fête nationale que le président avait choisi de passer avec la diaspora centrafricaine de France, Godfroy-Luther Gondje, citoyen centrafricain de son état, et membre du collectif «Touche pas à ma Constitution», s’était levé pour demander à son président s’il avait l’intention de changer la Constitution. La question était parfaitement justifiée vu les illégalités massives et systématiques pratiquées depuis 2005 par l’ancien chef rebelle devenu miraculeusement président en mars 2005, illégalement puisque par la fraude, procédé réitéré en janvier 2011 pour son second et dernier mandat. Accessoirement, plus personne d’ailleurs n’ignore les crimes de guerre commis lors de sa course au butin de Bangui de 2001 à 2003, et dont il devra forcément un jour ou l’autre rendre compte devant la Justice.

Donc, fauché dans son élan oratoire patriotique, François Bozizé, bredouillant et surpris par la question du compatriote Gondje, avait alors innocemment demandé où le jeune homme avait vu qu’il allait changer la Constitution.

Et pourtant, cinq jours après son innocente réponse à une candide question, le général-président Bozizé fait arrêter le coordinateur général du collectif « Touche pas à ma Constitution », voulant de toute évidence faire comprendre au peuple centrafricain que de vouloir défendre un droit fondamental et constitutionnel relève du banditisme. Inutile de dire au passage que rien que pour sa petite question candide de patriote bien pensant, Godfroy-Luther Gondje sera immédiatement jeté en prison s’il met les pieds à Bangui.

L’arrestation du citoyen et patriote Thierry Ndoyo n’est que la preuve noir sur blanc que Bozizé a bel et bien l’intention de modifier la Constitution à son avantage. Nous n’avons même plus besoin de lui poser la question, puisqu’elle a été posée et que le général-président y a aujourd’hui clairement répondu.

Bozizé ouvre donc publiquement la chronique annoncée de la violation de la Constitution centrafricaine.

Francois BozizéL’ancien chef rebelle, porté au pouvoir par le Tchad et la France en 2003, n’a aucune autre intention que celle de modifier la Constitution, de violer une institution sacrée, de violer l’espoir d’autodétermination du  peuple centrafricain tout entier. La limitation prévue de deux mandats présidentiels, deviendra donc de facto un seul mandat ad eternum. Aucun autre dirigeant centrafricain n’avait osé aller jusque-là depuis les pseudo-indépendances.

Cette nouvelle étape de la violation annoncée de la Constitution nous certifie que François Bozizé a commencé l’organisation d’une nouvelle fraude massive en 2016, qui le conduira dans son ultime mandat, éternel celui-là.

Nous pouvons déjà oser deviner, qu’au nom de leurs intérêts et biens mal acquis en RCA, les puissances occidentales, toutes représentées à Bangui donc témoins de tout ce qui s’y passe, ne feront pas grand cas de l’assassinat virtuel de la Constitution centrafricaine, et valideront tacitement l’acte illégal posé une fois encore par François Bozizé. S’en suivra son 3ème coup d’Etat électoral en 2016, lui aussi dans le sac des validations ubuesques occidentales.

Corollairement, le constat que nous pouvons faire à la nouvelle de l’arrestation d’un compatriote Thierry Ndoyo déjà très affecté par la mort de son frère cadet, est que tous les jeunes Centrafricains, qu’ils soient en RCA ou à l’extérieur, seront dorénavant considérés comme des bandits quand ils débattent ouvertement pour une vie meilleure en Centrafrique et pour l’intégrité de la Constitution centrafricaine, notamment sur Facebook, forum par excellence pour une expression libre et démocratique. Chaque Centrafricain conscient, patriote et fier de l’être, à l’instar de Thierry Ndoyo, sera donc automatiquement arrêté à sa descente d’avion à Bangui, et envoyé en prison, considéré comme un ennemi de l’Etat.

Tout ceci m’amène à mettre cette nouvelle formule de domination des esprits en lien avec la question du nouveau passeport CEMAC biométrique, obligatoire pour tout citoyen centrafricain depuis le 1er avril 2012, et pour lequel  le dépôt des empreintes digitales ne peut se faire qu’à Bangui. Aucune disposition n’a encore été prise pour organiser cette prise d’empreintes dans une quelconque représentation diplomatique centrafricaine. Ce qui nous fait  comprendre que le Centrafricain conscient, patriote et soucieux du profond désastre que vivent ses compatriotes au pays,  et qui veut se procurer son nouveau passeport obligatoire, se fera arbitrairement arrêter à Bangui ce faisant. Ou alors, il sera privé de passeport dorénavant. Bozizé est donc en train d’immobiliser et de pratiquement rendre apatride des milliers de Centrafricains de la diaspora.

La plupart l’a déjà compris, la nouvelle procédure pour obtention du passeport CEMAC sert à Bozizé de stratégie pour arrêter, paralyser et supprimer toute velléité de résistance contre son régime.

Bozizé confirme encore une fois très clairement sa position d’ennemi public no 1 du peuple centrafricain, entravant notamment les jeunes dans leurs efforts de développement et de formation. Par exemple, un médecin centrafricain, diplômé de l’Université de Bangui, exerçant à l’extérieur, et qui prévoit de se spécialiser sous des cieux où l’apprentissage d’une médecine de pointe lui permettrait ensuite de travailler pour le bien et le progrès de ses compatriotes sur la terre de ses ancêtres, est fauché net dans sa démarche de progression. Il n’a plus de passeport pour se déplacer. En se rendant à Bangui en tant que citoyen éclairé qui exprime librement son discernement, il est donc présumé « bandit » et « ennemi de l’Etat », et risque fort de se faire arrêter en descendant de l’avion.

Juliette Abandokwe

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