Nicolas Sarkozy et Mouammar Kadhafi, à Tripoli (Libye), en 2007. La justice enquête pour savoir si le dictateur a financé la campagne de l’ex-président français. (c) Reuters |
Fabrice Arfi et Karl Laske, journalistes à Mediapart, publient un livre qui détaille les compromissions de la droite française avec le régime de Mouammar Kadhafi. Où il est question du financement de la campagne présidentielle de Nicolas Sarkozy en 2007. Extraits.
C’est un livre qui donne le tournis. Le récit méthodique et détaillé de dix ans de compromissions de la sarkozie (et de la chiraquie) avec le régime dictatorial de Mouammar Kadhafi en Libye. Dans un mini pavé de 400 pages, intitulé Avec les compliments du guide, publié ce mercredi aux éditions Fayard, les journalistes de Mediapart Fabrice Arfi et Karl Laske rassemblent six ans d’enquête, abreuvée par des documents judiciaires et des entretiens avec différents protagonistes de l’affaire. Un certain nombre de ces révélations avaient déjà été distillées au fil des semaines dans Mediapart ou ailleurs. Mais le mérite de l’ouvrage, parfois ardu à lire, est de reconstituer un tableau cohérent et chronologique de la relation franco-libyenne et ses dessous peu reluisants.
Le fil rouge du livre porte sur les éléments liés à un possible financement de la campagne présidentielle de Nicolas Sarkozy par la Libye en 2007, qui fait l’objet d’une enquête judiciaire toujours en cours. Et le moins que l’on puisse dire en refermant l’ouvrage, c’est qu’il existe un faisceau d’indices concordants. L’audition, devant la Cour pénale internationale, d’Abdallah Senoussi, l’ex-chef du renseignement militaire libyen, qui déclare avoir lui-même supervisé le transfert de 5 millions d’euros. Les carnets de l’ex-premier ministre Choukri Ghanem, retrouvé noyé dans le Danube en 2012, faisant état de la répartition de sommes d’argent à distribuer. Ou encore cette fameuse note des services secrets libyens promettant 50 millions à Nicolas Sarkozy, exhumée par Mediapart et authentifiée depuis par la justice française, sans que l’on sache si un tel montant a vraiment été versé.
Au-delà de cette question que la justice devra trancher, le livre montre aussi comment la France a sous-traité une partie de ses relations diplomatiques et économiques à deux intermédiaires à la réputation sulfureuse: le Libanais Ziad Takieddine, qui attend d’être jugé dans le volet financier de l’affaire Karachi et qui est mis en examen dans le dossier libyen après avoir affirmé qu’il a lui-même convoyé 5 millions d’euros destinés à Claude Guéant et Nicolas Sarkozy; et Alexandre Djouhri, dont Challenges a déjà dressé le portrait, et qui serait, selon les auteurs, réfugié en Algérie de peur d’être arrêté à Paris ou à Genève.
Le chapitre 19 du livre s’attarde notamment sur les relations de Djouhri avec Claude Guéant* et Dominique de Villepin* et les largesses supposées de la Libye. A l’origine des soupçons de la justice: l’achat par Claude Guéant d’un appartement dans le 16ème arrondissement de Paris, soi-disant financé par la vente de deux tableaux flamands à un avocat malaisien. Une transaction suspectée de cacher des commissions venant de Libye.
Extraits (p. 199 à 202):
L’ami “très séduisant” de Claude Guéant :
Le mystérieux client de Dominique de Villepin : |
David Bensoussan
*Dans cette affaire, Claude Guéant a été mis en examen pour faux, usage de faux et blanchiment de fraude fiscale en bande organisée, tandis que Dominique de Villepin ne fait pas l’objet d’une mise en cause formelle. Tous deux sont présumés innocents.